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Niché par-delà les montagnes qui décrivent la beauté de l’Angleterre, se terre un magnifique village nommé Saint-Adams par ses fondateurs du même nom, il y a de cela plusieurs siècles. L’endroit est le fleuron de la bourgeoisie et de la royauté du monde entier, surtout reconnu grâce à son pensionnat pour jeunes hommes, fondé il y a de cela quarante-et-un an par la richissime famille Adams. Il s’agit de l’établissement d’éducation le plus reconnu pour engendrer l’élite la mieux établie au monde. Les jeunes adultes des meilleures familles y apprennent tant gestion de leur patrimoine, que la bienséance ainsi que toute forme de savoirs. Particularité du village, la population est exclusivement masculine. Qui serez-vous ?... Un étudiant brillant et sérieux ou un membre de la jeunesse dorée profitant de l'argent de papa ? Un professeur bien sympathique ou au contraire sadique ? Ou peut-être, un simple villageois vivant de folles aventures ? Le choix est vaste, et il ne tient qu'à vous de franchir les grilles de ce pensionnat..more~
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 Des souvenirs plein la tête [joris timble]

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Dans un idéal, je t'emmène en cavale


Déjà presque la fin Janvier. Une nouvelle année qui démarre au quart de tour et que j'ai le sentiment de voir déjà filer à toute allure. Dans quelques semaines je pourrais repartir en escapade à travers le monde, mais j'ai encore bien du temps pour préparer mon départ et choisir mon itinéraire et le programme de mon séjour. En attendant, je me suis chargé d'une mission des plus importantes pour le reste de l'année scolaire : découvrir qui est le nouveau surveillant chargé de nous servir de chaperon et me faire rapidement un avis sur lui.

Il faut bien que je sache si c'est un connard imbu de lui-même ou un type sympa avec qui je pourrais discuter entre deux cours pour éviter d'arriver trop tôt en salle de math'. L'ancien surveillant était cool, je pouvais lui parler de tout et de rien, il en oubliait de regarder l'heure et j'arrivais toujours en retard sans m'être fait enguirlander. Evidemment sur la fin il commençait à me connaître et regardait sa montre plus régulièrement, mais je trouvais toujours le moyen de l'embobiner à coups d'heures de permanences tombant à pic.

On m'a parlé d'un jeune adulte grand et brun. Plus qu'à chercher la seule tête qui ne me serait pas familière parmi les membres du personnel et me montrer le plus agréable possible pour tâter le terrain. Je tournoie dans les couloirs sans trop me soucier de l'heure ou des cours qui débutent dans les salles que je longe. En fin de matinée, on pourra croire que je suis simplement en pause déjeuner. Si j'ai cours ? Secret défense. Qui en dehors de mes prof', peut le savoir ? Je continue donc de déambuler sagement pour trouver la star.

Star que je trouve bientôt dans un couloir, le meilleur endroit pour dénicher quelqu'un de son espèce. Le rôle des surveillants consistant justement à ... surveiller. Je m'avance vers lui sans fléchir, sûr de moi, comme si je n'étais pas en trian d'enfreindre les règles du pensionnat. De toute façon il ne les connait probablement pas encore toutes. J'ai quelques jours de latence avant qu'il ne se rende compte de mes différentes infractions et j'ai bien l'intention de profiter de ce répit jusqu'au dernier moment. Question de talent.

- Salut ! C'est toi le nouveau surveillant ? Je suis Andrew, ravi de te connaître.

Je lui offre mon plus beau sourire, celui de l'élève modèle prêt à rendre service au plus nécessiteux. Ma gueule d'ange et ma capacité à jouer avec les mots me permet des tours de passe-passe que m'envient les fouteurs de merde connus et reconnus. Je suis un fléau pour le personnel parce que je ne suis pas un mauvais gars et que mes conneries s'équilibrent avec mon tempérament jovial et ma bonne bouille. En quelques mots, je suis un gosse chahuteur mais agréable. C'est ce qui se dit de moi en salle des prof', en tout cas.

- Tu remplace Hyun, c'est ça ? Tu bossais où, avant ?

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Dire que le weekend précédant sa prise de poste officielle au sein du pensionnat était passé à une vitesse éclair serait un euphémisme. Et dans le fond, cela n’était pas plus mal. Après tout, en l’espace de 48h après son arrivée, il avait failli se voir interdire d’accès au complexe sportif hors jours scolaires ainsi qu’à l’église. Ce serait peut-être là un record personnel à faire valoir pour une nouvelle catégorie dans le fameux Livre Guinness. Cependant, cela ne faisait pas de lui un privilégié lors de ses premiers jours en tant que surveillant. Joris en vint même à regretter de s’être tourné vers une telle fonction. Certes, il lui fallait un poste relativement facile à obtenir et sans réelles contraintes en termes de durée. S’il décidait de partir le mois prochain, cela était tout à fait possible, à condition de respecter son préavis de départ. Aucune responsabilité particulière, hormis celle d’encadre des gosses de riches. Oui, cela n’aurait pas dû lui poser le moindre problème. Du moins, il le crut jusqu’à entendre le brief de son responsable. En soi, son rôle consisterait en deux missions : patrouiller au sein du pensionnat pour intercepter le moindre fauteur de troubles et superviser les heures de permanence ou de colle suivant les profils. En clair, jouer le flic pour adolescents pré pubères et gâtés pourris jusqu’à la moelle de surcroit. Pas étonnant qu’on lui ait rapidement proposé le poste à la suite de sa candidature : qui aimerait faire ce métier toute sa vie ?

Heureusement, ses collègues ne se prenaient pas autant au sérieux que leur responsable. Certes, chacun avait sa manière de procéder avec les élèves : se montrer strict pour éviter les débordements ou au contraire, se la jouer cool pour éviter les prises de tête inutiles. Là-dessus, Joris n’avait pas de raison de se plaindre. Il tendit bien volontiers une oreille pour entendre les conseils qu’on lui transmettait, non pas sans fierté, concernant quelques têtes brûlées dont il ferait mieux de se faire respecter dès le départ. Rien de bien préoccupant en soi. Il faut dire qu’avec ses quelques centimètres au-dessus du mètre 80, le jeune homme savait se montrer dissuasif sans même ouvrir la bouche. Bien évidemment, il n’était pas à l’abri d’un élève plutôt grand pour son âge ou d’un forceur que rien ne décourageait mais cela ne l’inquiétait pas outre mesure. Non, ce serait définitivement ses interactions sociales qui risquaient de poser problème. Son manque d’expressions et son regard appuyé rendaient facilement mal à l’aise. Joris l’avait bien remarqué au moment de faire connaissance avec ses collègues mais ces derniers mettaient cela sur une volonté de faire preuve de détachement sur son lieu de travail. Quelqu’un qui ne laisserait pas transparaître ses émotions face à un élève perturbateur serait très certainement plus à même à gérer les situations difficiles.

A l’approche des heures de cours habituelles, les couloirs se vidaient progressivement. Le silence se faisait dans toute l’école, hormis peut-être dans le gymnase ou les terrains de sport pour les cours d’éducation physique. Au mieux, on entendait parfois les voix des professeurs s’élevaient de derrière la porte d’une salle de classe. Cela renvoyait l’impression que l’école était déserte, à la manière d’un weekend. Avec un peu d’imagination, on pouvait imaginer un mort-vivant surgir à l’autre extrémité du couloir. Ou alors était-ce parce qu’il avait vu trop de films de ce genre par le passé ? Patrouiller dans les couloirs consistait très probablement la partie la plus agréable de son poste en tant que surveillant. A moins d’être témoin d’un acte nécessitant son intervention directe, le jeune homme se contentait de visiter les lieux, appréciant le calme qui en résultait après le brouhaha causé par les étudiants se rendant à leurs cours respectifs. Peut-être qu’après des mois à travailler ici, Joris se lasserait de monter les mêmes escaliers et de parcourir les mêmes longs couloirs sans fin. Toutefois, il ne préférait pas y songer pour le moment, espérant que son séjour à Saint Adams ne s’éterniserait pas. Un village isolé peuplé d’homosexuels, très peu pour lui.

Les bruits de pas émanant de sa progression en solitaire trouvèrent soudain un écho et le jeune homme tourna la tête en direction du nouveau venu. Son visage ne lui disait strictement rien et pourtant : des cheveux d’un noir de jais et des yeux bleus comme le ciel d’été, il s’en serait souvenu. S’il avait eu le moindre doute sur l’identité du garçon, son âge aurait pu le renseigner sur la raison de sa présence en ces lieux. Sauf que Joris avait rencontré l’ensemble de l’équipe chargée de la surveillance des élèves, si bien qu’il lui était aisé de ranger celui-là dans la seconde catégorie. Cependant à mesure que la distance se réduisait entre eux, il prit conscience d’un détail et pas des moindres : est-ce que ce salopard faisait la même taille que lui ?! Dire qu’il offrait un visage plutôt juvénile, quel âge pouvait-il avoir ?! Allons bon, il ne pourrait même pas le prendre de haut celui-là ! Et surtout, que faisait-il dans les couloirs à une heure pareille ? Joris attendit patiemment qu’il daigne lui adresse la parole et tiqua sur le tutoiement. De toutes évidences, ce gosse-là se permettait des familiarités envers le personnel et ce, dès les premiers échanges ? Soit il était stupide, soit il avait du culot. Au choix. Impassible, le jeune homme lui rendit son regard. Son expression ne trahissait ni agacement, ni sympathie à l’encontre du nouveau venu. Il se contentait de le jauger en silence.

« Andrew c’est ça ? Tu n’as pas cours ? »

Hyun ? Il ne connaissait pas cette personne, même s’il pouvait deviner quelle était sa fonction au sein de l’école. Quant à la perspective de l’entendre raconter toute sa vie ainsi que les raisons qui l’avait conduit ici, le gosse pouvait oublier l’idée. Et comme pour enfoncer le clou, Joris reprit sur le même ton :

« Autre chose : pour toi, ce sera « monsieur » ou « vous ». Alors ? »

Si on lui avait dit qu'il distribuerait ses premières heures de colle dès son second jour en tant que surveillant, jamais il ne l'aurait cru ! Pourtant, Andrew semblait sur la bonne voie compte tenu de sa présence dans les couloirs pendant les heures de cours. A moins qu'il n'ait une bonne raison pour justifier cela ? Le jeune homme en doutait mais tout était possible avec l’ingéniosité dont certains de leurs petits protégés faisaient preuve. Le meilleur conseil que ses collègues avaient pu lui donner avant son tour, était très certainement de se tenir prêt à toute éventualité.
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Dans un idéal, je t'emmène en cavale


J'ai pris le temps de l'observer en arrivant jusqu'à lui mais c'est maintenant que je me retrouve bien en face et à l'arrêt, que je me rends compte de quelques détails primordiaux pour la suite de notre "relation". D'abord, il est grand. Quasiment ma taille, en fait. Si ce n'est la même. Je ne suis donc pas à l'abris du genre de surveillant qui joue de son gabarit pour en imposer plutôt que de chercher à sympatiser avec les gosses du bahut.

Ensuite, il est séduisant. Bon ... ok ça c'est un détail qui n'a aucune valeur. Non mais ce sont ses yeux qui m'intriguent, en fant. Enfin ... son regard. Un regard vide, inexpressif. Le contraire parfait de Hyun qui appelait à l'amitié. Ce nouveau pion n'a rien. Ni colère, ni séverité, ni amabilité remarquable. Je ne vois juste rien et c'est ... frustrant ? Intriguant ? Les deux à la fois, probablement. Je garde donc mon jugement pour l'instant, prudent.

Malheureusement pour moi, la fameuse première question qu'il se devait de me poser arrive à grands pas et celle-là, je la vois toujours venir à des kilomètres. Après tout, n'est-ce pas là le fondement même de son poste au pensionnat ? J'étire un sourire, hausse les épaules, fait mine d'être le plus parfait innocent qu'il lui ait été donné de rencontrer. Si mon prénom ne le fait pas tiquer, et ce n'est visiblement pas le cas, c'est que j'ai une chance.

Rapidement, le surveillant envoie la couleur et pas des moindres. Ici -et j'entends par "ici" le cercle relationnel qui nous unie actuellement lui et moi- nulle place pour la moindre familiarité entre le pion et l'étudiant. Je ne suis que le mouchard à torcher et lui le gardien des sacro-saintes clés de ma liberté. Je déchante rapidement mais ne peds pas mon sourire, bien décidé à ne pas me laisser désarmer si vite. J'ai d'autres tours dans mon sac.

- Hm non, je suis en permanence m'sieur. En fait j'allais justement à l'intendance récupérer une autorisation de sortie pour les prochaines vacances.

Je lâche le "m'sieur" sur un ton égal, comme s'il m'était naturel de l'employer avec tout les membres du personnel. Ce n'est évidemment pas le cas, mais si ça peut suffir à amadouer la nouvelle bestiole qui me fait face, alors je serais un élève discipliné et poli aussi longtemps qu'il sera nécessaire de l'être. Mais min intervention ne s'arrêtera pas aux simples échanges de courtoisie, n'est-ce pas ? Comment apprendre à connaître l'ennemi sans parler ?

- Vous connaissez l'Islande ? J'ai trimé toute l'année pour visiter ce magnifique pays et j'ai bien l'intention de ne pas rater le départ à cause d'un petit papier et d'une pauvre signature, si vous voyez c'que j'veux dire ...

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En dépit de son ton sec appelant à la discipline, le gamin ne perdit pas son sourire. Irrécupérable. S’ils étaient tous comme ça, ses prochains mois en tant que surveillant promettaient d’être intenses. Quoiqu’il en soit, Joris ne perdit pas un mot des propos de son interlocuteur. Alors ça, l’autre prétendait être en permanence ? Alors pourquoi diable ne se trouvait-il pas dans la salle prévue à cet effet où un autre de ses collègues assurait la surveillance en ce moment même ? De ce qu’il en savait, les permanences ne s’effectuaient pas encore dans les couloirs, à traîner comme le faisait Andrew. L’explication ne tarda pas à tomber et le jeune homme fronça légèrement les sourcils. C’est vrai que le pensionnat possédait son propre internat et que la plupart des garçons envoyés ici l’étaient du fait de la décision de leurs parents en vue de leur assurer une bonne éducation, loin des tentations des charmes féminins. Et qui disait internat disait forcément la délivrance d’autorisation de sorties pour les plus chanceux des élèves. Force était de reconnaître que son explication tenait la route, même si Joris n’apprécia pas spécialement le « m’sieur » lancé sur un ton égal, comme si c’était là la manière la plus appropriée de s’adresser au personnel de l’établissement. Le jeune homme se retint de soupirer. Avant même qu’il n’ait le temps de lui répondre quelque chose, le dénommé Andrew enchaînait déjà, évoquant ce qui semblait être sa destination pour les prochaines vacances scolaires. L’Islande hein ? Il s’agissait effectivement d’un beau voyage. Un très beau voyage.

« Je n’y ai jamais mis les pieds. Contrairement au bureau de l’intendance. Et puisque je ne voudrais surtout pas prendre le risque de te priver d’un si beau voyage, je vais t’y accompagner. Tu n’y vois pas d’inconvénients j’espère ? »

Intraitable. La question n’en était que plus rhétorique à ses oreilles. Si Andrew était sincère, alors il ne se défilerait pas jusqu’au bureau de l’intendance pour récupérer cette fameuse autorisation de sortie. Et s’il lui prenait malencontreusement l’envie de jouer au con avec lui, la situation en serait tout autre. A vrai dire, Joris n’attendit pas de réponse. Déjà, il pivotait sur lui-même pour prendre la direction indiquée, attendant tout naturellement à ce que l’adolescent le suive. Mais avant de s’en assurer, il lui vint alors une seconde question, plus directe cette fois :

« Pendant que j’y suis, montre-moi ta carte étudiante. »

Les carnets de correspondance, c’était démodé, tout juste vintage. Désormais, l’établissement avait mis en place un système de cartes distribuées aux élèves, lesquelles leur permettaient entre autre d’effectuer des achats dans les nombreux distributeurs que comprenait le campus. Et, optionnellement, les informations relatives aux emplois du temps étaient également inscrites au dos des cartes, ce qui permettait un flicage – contrôle plus efficace vis-à-vis des petits malins qui essayaient de sécher les cours en toute discrétion.
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Oups. C'est la première chose qui me vient en tête alors que monsieur le nouveau surveillant prend l'initiative de m'escorter jusqu'à destination. Là, je reconnais que l'aventure se corse. J'ai exactement trois couloirs, un escalier et une bonne quinzaine de portes pour inventer une nouvelle histoire, avant de me faire avoir à mon propre piège. Nouvelle donnée concernant l'énergumène qui me fait face : averti et consciencieux.

Ce qui ne m'aide en rien dans mes plans pour le reste de l'année. J'acquiesce dans un grand sourire et je me mets déjà en marche sans broncher et le suit. L'apprenti flic ne dérogera certainement pas à l'une de ses propres règles. Mais pas si pressé que ça, je marche d'un pas tranquille, comme si nous n'étions que deux bonshommes profitant d'une balade revigorante sur les berges d'un lac. Pourtant dans ma tête, c'est l'effusion totale.

Et là, c'est le drame. Mon cerveau cogite à toute allure. J'ai très exactement une demi seconde pour trouver une astuce avant de me faire proprement envoyer bouler, avec une heure de colle en prime. Si ce n'est pas le double, dépendamment du tempérament sadique ou non de mon nouvel interlocuteur. Et je me garde de me faire un avis. Alors ... Oui m'sieur, j'ai ma carte étudiante. Oui m'sieur, je peux vous la montrer. Mais ! Mais ... Mais ...

- Je l'ai perdue. Vous savez, je bouge énormément en dehors des cours et y'a pas très longtemps je m'suis fait voler mon porte-feuilles. D'ailleurs, vous m'faites justement penser qu'il faut que j'en demande une autre en même temps que mon autorisation !

Bon ... voilà un peu de temps gagné. Tout du moins je l'espère, mais malgré mon sourire empli de bonne volonté et mon regard qui se veut amical, l'adulte devant moi n'a visiblement pas le temps de se faire berner par des étudiants et je doute qu'il continue de marcher encore longtemps dans mes combines foireuses. Je finirais par me faire chopper, c'est à peu près certain. Cependant si je peux encore grappiller du temps, je le ferais.

- L'Islande est magnifique. J'ai fait la Russie, il y a quelques années, et j'y suis retourné récemment avec un ami du pensionnat. On cherchait nos pères biologiques, donc on a couru un peu le monde. Le mien est aux Etats-Unis, c'est notre prochaine destination à deux. Vous connaissez les USA ?

Oh bon sang je suis vraiment mal barré. J'aurais pris plaisir à cette joute verbale si j'avais été sûr de la remporter, mais à ce stade de l'épreuve je ne saurais dire lequel de nous deux à l'avantage sur l'autre. Je suis un beau parleur, je sais blablater et faire tourner mes interlocuteurs en bourrique, mais lui est tellement inexpressif que je n'ai aucune idée si mes tentatives obtiennent gain de cause ou non. Je suis dans le flou total depuis le début.

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La fameuse carte étudiante. Atout à double tranchant. Si son jeune interlocuteur était dans le vrai depuis le début, il ne verrait aucun inconvénient à la lui remettre en mains propres n’est-ce pas ? Le cas échéant, le petit rectangle en plastique ne tarderait à le démasquer, lui faisant écoper d’une jolie heure de colle bien méritée en sa compagnie. A moins que Joris ne trouve le moyen de refiler la garde de l’énergumène à l’un de ses collègues. Andrew avait la langue trop bien pendue pour lui, à la limite du supportable. La preuve : non content de simplement lui signaler la perde accidentelle de sa carte étudiant, voilà que son interlocuteur repartait de plus belle dans des explications poussées pour justifier le pourquoi du comment. Evidemment, le surveillant n’était pas dupe. Cette perte survenait pile au bon moment pour l’empêcher de contrôler l’emploi du temps d’Andrew. Etrange coïncidence. Ses collègues l’avaient d’ores et déjà formés sur les nombreuses excuses mises en avant par les étudiants pour se défiler sous la menace d’une punition. Malgré cela, ils l’avaient averti que d’autres seraient encore à trouver. C’est qu’ils étaient malins ces petits fils de bourges.

« Ah vraiment ? Je note que ça n’a pas l’air de t’inquiéter outre mesure puisque tu penses effectivement à ton autorisation mais moins à ta carte étudiante, pourtant indispensable en ces murs… »

Pour un peu, la situation l’aurait presque amusé. Presque. En son for intérieur, Andrew devait sentir que son petit manège ne prenait pas sur son interlocuteur. Pire, cette succession de mensonges assumée risquait de lui attirer davantage d’ennuis à mesure qu’il se voyait doucement mais sûrement pris à son propre piège. A quoi devait-il réfléchir à cet instant précis ? A comment se sortir de ce pétrin dans lequel il s’était fourré tout seul ? Avait-il seulement pris conscience de la tournure désavantageuse des événements à son encontre ? Peut-être pas. Qui sait ? Joris n’était pas télépathe. Et le sourire franc de l’étudiant ne lui permet pas de déceler la moindre montée de stress. Il semblerait qu’ils soient aussi bon acteur l’un que l’autre. Dommage. Cependant, Andrew, fidèle à lui-même, reprenait de plus belle la parole pour déblatérer sur ses nombreux voyages, à commencer par l’Islande. Il ne s’arrêtait jamais de parler celui-là ? Le surveillant se fit la réflexion qu’il était peut-être temps de mettre un terme à son petit manège si l’autre croyait encore pouvoir le berner. Un mot attira toutefois son attention.

« Hmm. »

Alors comme ça, le gamin s’était mis en tête de retrouver son père biologique ? En effet, il n’était pas rare que les familles explosent de l’intérieur, conduisant parfois les enfants à perdre de vue l’un de leur parent. Lui-même était bien placé pour le savoir. Mais il espérait ne pas avoir à « courir le monde » pour retrouver la trace de son paternel. Venir s’installer dans ce trou paumé était bien suffisamment à ses yeux. Les Etats-Unis ? Joris ne connaissait pas plus que l’Islande, pour n’avoir jamais mis les pieds en dehors du pays. S’il le vivait comme un manque de n’avoir pas voyagé jusqu’ici ? Pas vraiment. Cela lui était indifférent. Certains avaient besoin de découvrir de nouveaux horizons pour se sentir exister. Ce n’était pas son cas. Alors plutôt que de suivre le rythme d’Andrew, le surveillant attaqua avec une autre question :

« Cela fait beaucoup de voyages dis-moi. J’imagine que cela doit représenter une coquette somme à mettre de côté. Tu travailles à côté de tes études ? »

Peut-être n’était-ce pas une si bonne idée que cela d’enjoindre son interlocuteur à parler davantage. Même s’il avait voulu lui tirer les vers du nez, Joris n’aura pas eu besoin de le faire. Mais plus il en apprendrait sur les petits malins du pensionnat et mieux ce serait pour lui. N’était-ce pas la stratégie qu’employait l’étudiant à son égard après tout ?
Je n'ai absolument pas eu de notification pour ta réponse, du coup j'ignorais que tu m'avais répondu... je suis vraiment désolée pour le retard ! ><"
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PS : No problem ! Et désolé pour mon temps de réponse, j'ai été pas mal occupé et j'ai un peu de mal avec Andrew en ce moment x)

Je hausse vaguement les épaules. Franchement existe-t-il un seul étudiant qui soit suffisamment accroc à sa carte pour la faire passer prioritaire sur sa passion ? Je suppose que oui, mais je n'ai jamais fait partie de cette catégorie d'élèves. J'ai bien trop souvent la tête dans les nuages. Alors si mon mensonge est au moins aussi grand que je peux l'être moi-même, la possibilité que je ne m'inquiète pas outre mesure de sa potentielle perte n'est, elle, pas un véritable tromperie. Si je l'avais réellement égarée, je me ficherais pas mal de la retrouver en quelques minutes ou quelques semaines.

Je me prépare mentalement à subir le reste du trajet jusqu'au secrétariat dans un silence de mort. Parce que si le nouveau surveillant semble n'avoir rien d'un criminel sadique, j'ai bien compris que la causette n'était pas son fort et qu'il n'était pas venu se perdre dans notre trou paumé pour se faire ami des étudiants du campus. Il est de ceux qui viennent là pour bosser, gagner du fric et manger à la fin du mois, rien de plus. Je me résigne à l'idée qu'il ne sera pas parmi mes bonnes connaissances et que nos relations demeureront probablement cordiales.

Pourtant sa question m'éveille de nouveau, alors je ralentis le pas pour me trouver bien à côté de lui et je tourne la tête pour pouvoir poser mes yeux sur son visage. Un visage pourtant attirant, si on exclus la totale inexistence d'émotions qui pourraient et devraient normalement le parcourir. Peu importe après tout, je suis sensé être un simple étudiant concentré sur son cursus et ne suis pas là non plus pour me faire des amis, n'est-ce pas ? Mais s'il est assez curieux pour m'interroger sur mes voyages, il va rapidement trouver un interlocuteur digne de ses quelconques interrogations.

- En fait je bosse en dehors des cours, oui. Quand je pars, c'est seulement avec un sac à dos. Quand j'arrive sur place, je me débrouiller pour dégoter un job qui me permettra non seulement de rencontrer du monde, mais aussi de me payer le gîte et le couvert. S'il faut, je dors quelques nuits dans un duvet et je trouve un ruisseau pour me laver les premiers temps. Ca n'a rien de bien glorieux, mais la richesse du voyage n'a pas d'équivalent quand on accepte de se débrouiller tout seul. Le confort occidental n'est pas vital.

Déjà sur mon visage se dessine de nouveau ce sourire insolent de celui qui est fier de raconter, et dans mes yeux défilent un millier de souvenirs qui resteront longtemps gravés. Certains préfèrent trouver une vie paisible et se poser le plus tôt possible. Moi je m'imagine un jour raconter à mes descendants si je devais en avoir, que j'ai pu voyager à travers le monde pour rencontrer les meilleures personnes qui soient. Je veux pouvoir dire que j'ai vraiment vécu, et ça passe par la découverte de toutes ces choses qui me sont inconnues aujourd'hui et que je découvrirais.

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Pourquoi avoir posé la question si la réponse ne l’intéressait qu’à moitié en fin de comptes ? Parce qu’en son for intérieur, Joris était convaincu que la plupart – si ce n’est la quasi-totalité – des étudiants arrivés à Saint Adams étaient issus de familles bourgeoises. Qui d’autres enverraient leurs rejetons dans une ville entièrement peuplés d’hommes sinon ? La notoriété de l’école faisait naître des frais d’inscription exorbitants, même pour un coin paumé comme celui-ci. A croire que le monde ne tournait plus rond. Aussi, lorsqu’il se surprit à interroger pour la première fois son interlocuteur sur un autre sujet que celui touchant de près ou de loin à l’école, le surveillant s’attendait plutôt à piéger ce dernier, qui se verrait contraint d’admettre que ses parents, en plus de financer ses études, lui payaient ses vacances. Ou peut-être qu’Andrew trouverait une nouvelle excuse pour justifier ses nombreux voyages au frais de ses géniteurs ? Allez savoir. Ce gamin n’avait pas sa langue dans sa poche et le grand brun était presque curieux d’écouter ce qu’il aurait à lui répondre. Toutefois, la réponse de l’étudiant ne fut pas celle qu’il attendait. Alors comme ça, le gosse bossait en dehors des cours pour se payer ses voyages ? En plus de se montrer débrouillard une fois sur place pour limiter au maximum les frais ? Si c’était bien la vérité qu’Andrew lui fournissait, alors il devait au moins lui reconnaître le mérite de ne pas complètement dépendre de ses parents pour quelqu’un de son âge. Joris l’écouta sans rien dire avant de lui jeter un long regard.

« Je suis surpris. Tu n’es pas un fils à papa en fin de comptes. »

Son manque de tact n’avait d’égal que sa franchise. Le surveillant se rendit compte plus tard que sa tournure de phrase était encore plus vicieuse ainsi formulée en faisant allusion à ce père qu’Andrew s’était mis en tête de retrouver. Tant pis. Il n’avait que faire de la sensibilité d’un jeune adulte. La vie lui en réserverait bien d’autres. Leur progression les amena dans le couloir où se trouvait le secrétariat. S’il avait été dans le genre expressif, Joris aurait laissé entrevoir une joie mauvaise étirer les traits de son visage. Peu importent les mensonges et pirouettes d’Andrew à son égard. Ils savaient tous les deux que le surveillant n’était pas dupe à ce point. Dans quelques minutes, ils franchiraient la porte du secrétariat et le grand brun aurait l’occasion de vérifier l’emploi du temps de son interlocuteur, le piégeant par la même occasion. Et si Andrew n’avait effectivement rien à faire dans les couloirs à cette heure de la journée, le surveillant se ferait un plaisir de lui attribuer une ou deux heures de colle bien méritées. Même si avant cela, il devrait s’assurer que son propre emploi du temps ne coïncide pas avec l’horaire de la punition réservée à l’étudiant. Il ne manquerait plus qu’il soit de corvée pour surveiller Andrew pendant ces heures de colle. Ou alors, le menacer de prolonger la punition chaque fois que l’étudiant ouvrirait la bouche.

« Tu es certain de n’avoir rien d’autres à me dire Andrew ? »

Cette fois, le regard acier sonda celui de son interlocuteur, comme si cela pouvait lui permettre de lire dans les pensées de ce dernier. Même s’il se décidait à avouer à seulement quelques mètres du secrétariat, Andrew ne parviendrait pas à alléger sa punition. Se faisant, il lui ôterait également le plaisir sadique de prendre l’étudiant à son propre jeu. Toutefois, Joris voulait voir jusqu’où irait l’entêtement de son interlocuteur à poursuivre sur la voie du mensonge. Un petit coup de pression n’avait jamais tué personne. C’était même tout aussi plaisant à utiliser qu’à épingler ouvertement le mensonge de l’un de ces étudiants. Alors quoi ? Est-ce qu’Andrew allait saisir sa dernière chance d’avouer qu’il séchait actuellement les cours ?
Pas de notif again... désolée du temps de réponse :/
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Sa remarque m'arrache un rire bref. Un fils à papa ? Oui, certainement que dans ce genre d'établissement la plupart des élèves fait partie de la haute société. Sûrement même que bien rares sont les étudiants qui sont venus là par leurs propres moyens, en bossant dur pour obtenir des bourses et autres aides financières. Je fais partie de ces cas exceptionnels, ceux-là même qui se sont acharnés durant de longues années pour avoir un dossier d'admission en béton et passer devant les moins fortunés de la richesse anglaise. Je me demande d'ailleurs ce qu'aurait été ma vie en héritier fortuné.

J'aurais profité de l'argent de papa et maman, sûrement, comme tous les gosses de riche le font. J'aurais eu des bolides de luxe avant même de savoir conduire, j'aurais passé ma vie à ne rien faire d'autre qu'attendre la bouche grande ouverte pour qu'on me mette des mets luxueux entre les dents. J'aurais peut-être apprécié ce rythme, dans une autre vie. Ou alors aurais-je été un être triste et morose, le genre malheureux qui a besoin de pourrir les autres pour se sentir un peu plus vivant, un peu plus ancré au sol. L'argent ne fait pas le bonheur, non.

- Pour ça faudrait que j'aie un père.

J'étire une grimace amusée à l'évocation de cet homme disparu qui n'a jamais fait partie de ma vie. Evidemment le pion ne voulait probablement pas dire ça, ce n'est qu'une expression toute faite. Mais la réplique m'est venue du tac au tac et même si le sens de sa phrase n'était pas tout à fait celle-là, j'ai ressenti l'envie de préciser un peu ma situation. Oui j'aurais pu être le riche héritier d'une femme, aussi. Mais même ce cas de figure-là n'est pas le mien. Pourtant au lieu de m'apitoyer sur un sort auquel je me suis fait depuis longtemps ...

- Rien d'autre ? Hm ... Si ça vous intéresse je peux encore vous parler de mes voyages mais je crois que vos collègues vont s'impatienter.

Au bout du couloir, la porte ouverte sur le secrétariat me semble entourée d'onyx, plus menaçante que jamais. Pourtant je garde mon sang-froid et un sourire parfaitement à l'aise malgré la situation. Oui j'ai perdu cette bataille et oui, la sentence risque de se sentir longtemps après cette journée. Mais ma foi que faire d'autre si ce n'est partir en courant et disparaître de Saint Adams ? Franchement pour une ou deux heures de colles, je ne mettrais pas en danger ma scolarité toute entière. Autant accepter la défaite de bonne grâce et trouver une meilleure astuce pour la prochaine fois.

C'est donc d'un pas tout à fait à l'aise que j'entre dans le bureau des secrétaires et avec un sourire poli étirant mes lèvres que je salut les autres membres du personnel déjà présentes. Je me cale hors du passage pour laisser passer Joris et ne déranger aucun mouvement dans la pièce, attendant patiemment que l'homme brun fasse son boulot et se décide à me punir comme il se doit. Je prépare un haussement d'épaule nonchalant à sa prochaine réplique, bien conscient d'être sur le point de me faire lyncher proprement et à juste titre pou mes farces sans fin.

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Un père hein ? Derrière l’insolence de la remarque, la blessure d’avoir grandi jusqu’à présent sans modèle paternel n’en était que plus palpable. Andrew n’en avait peut-être pas conscience mais seule sa fierté mise à mal s’exprimait au travers de ces quelques mots. Comment le lui reprocher après tout ? Les années seules ne pourraient suffire à complètement effacer la blessure que celle de s’être senti abandonné. Indésirable aux yeux du père. Cette conversation en apparences anodine avec un élève qui dissimulait de plus en plus mal ses mensonges, se révéla soudain bien trop intime aux oreilles du surveillant. Non pas qu’évoquer l’absence d’une figure paternelle soit devenu un sujet tabou avec le temps mais Joris n’appréciait pas avoir à se remémorer les souvenirs de son enfance liés à son père. Il était évidemment qu’Andrew n’avait pas abordé le sujet dans le but de le mettre de mauvaise humeur car ce dernier ignorait tout de sa situation familiale. Seulement, le grand brun avait la désagréable intuition que s’il avait volontairement tout fait pour écarter le sujet de leur discussion, cela aurait été remarqué par l’élève, lequel se serait fait très certainement un malin plaisir de revenir là-dessus à la moindre occasion. Autant laisser couler. En apparences du moins.

« Nous avons tous un père. Même s’il n’est pas toujours celui que l’on souhaite. »

Ce n’étaient pas les cours d’éducation sexuelle qui allaient affirmer le contraire. Techniquement et biologiquement, on ne naissait pas sans père. Quant à savoir si on l’appréciait ou non, c’était autre chose. Et il en allait de même pour sa mère. Conscient d’en avoir un peu trop dit, Joris choisit de clore le sujet pour passer à autre chose, optant pour la diversion. Comme il pouvait s’y attendre, Andrew ne mordit pas à l’hameçon et le surveillant en aurait presque soupiré. A quoi bon s’entêter dans ses mensonges alors qu’on se savait pris de toutes évidences ? Ce n’était pas logique. D’un côté, venant d’un gamin comme Andrew, cela n’aurait pas dû le surprendre. Il les connaissait les étudiants. Ceux-là qui préféraient s’obstiner dans le déni plutôt que d’assumer leurs fautes. Même pris la main dans le sac, ils continueraient de clamer leur innocence. Abrutis finis. Il déclina poliment ou presque la proposition d’Andrew de l’instruire davantage sur les nombreux – et passionnants à ne pas en douter ! – voyages qu’il avait entrepris par le passé et entra dans le secrétariat.

Quelques-uns de ses collègues se trouvaient sur place et levèrent les yeux en les voyant arriver. La surprise et l’amusement ne tardèrent pas à se lire sur leurs visages quand ils aperçurent Andrew et cela confirma la théorie du grand brun. Ce gamin-là devait être connu de leurs services. Laissant le soin à l’intéressé d’échanger quelques mots avec les autres surveillants présents sur place, Joris contourna rapidement le bureau principal pour s’installer devant l’ordinateur. Après avoir obtenu le nom de famille de l’étudiant, il ne fut pas long à le retrouver parmi la liste des élèves présents sur le campus. Quelques clics supplémentaires suffirent à lui donner accès à l’emploi du temps d’Andrew et de constater que ce dernier aurait dû se trouver, non pas dans leur secrétariat, mais en cours d’histoire. Quelle surprise !

« Ton bagou doit cruellement manquer à ton professeur Monsieur Harper… Je présume qu’en plus des cours d’histoire, il assure la permanence désormais ?»

Franchement. Il n’avait pas mieux à faire que de reprendre des gamins comme celui qui se trouvait en face de lui ? Et connaissant l’animal, quelques heures de colle ne l’empêcheraient absolument pas de recommencer l’école buissonnière. C’était à se demander à quoi servaient les punitions et l’autorité toute relative que le personnel incarnait au sein du pensionnat… Ignorant les commentaires de ses collègues hilares, Joris ne se démonta pas.

« 4 heures de colle. Samedi matin. »

Sitôt la sentence communiquée, le grand brun l’inscrivit sur le planning des surveillants. Il ne lui restait plus qu’à trouver quelqu’un de disponible sur ce créneau pour surveiller l’étudiant. Hors de question qu’il s’en occupe personnellement, quand bien même le travail serait mieux fait que pour certains de ses collègues, certainement trop coulants avec Andrew.
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Dans un idéal, je t'emmène en cavale


C'est le moins qu'on puisse dire, oui. Je suis de ceux qui n'ont pas eu de chance, de ceux qui se sont retrouvé avec un mot sans visage, quelques lettres sur un bout de papier comme seul nom auquel s'identifier. Mais si j'aurais pu déblatérer des heures sur la non gravité de n'avoir qu'un parent féminin pour exemple, je laisse le sujet se clore là. Je n'ai pas tant envie que ça d'approfondir la chose, d'autant moins avec ce surveillant aux émotions incertaines. Je ne sais toujours pas s'il m'apprécie ou me déteste, même si j'imagine sans mal la réponse.

Alors que j'entends d'une oreille attentive les cliquetis du clavier sur lequel tape mon bourreau du jour, je me permets sans trop de scrupule quelques échanges avec les autres surveillants. Ils savent pourquoi je suis là, et la plupart s'est déjà résigné à mon incurable manie. Malheureusement pour mes professeurs je ne tiens pas en place, et pire encore je parviens malgré tout à me maintenir dans des moyennes correctes qui les empêchent de me lyncher totalement. J'appuie mon bassin à la tranche d'un bureau et j'attends patiemment la sentence. Une ou deux ? Je paris pour deux heures de colle.

Mais finalement il arrive encore à me surprendre. Je hausse légèrement les sourcils en posant mon regard sur son visage clos. Quatre ? Tout ça pour avoir séché une heure ? C'est qu'il est dur en affaires, celui-là ... Je me redresse comme pour essayer de rattraper ma conduite, même si je sais parfaitement qu'il est déjà trop tard pour ça. Je l'observe en silence, quelques secondes tout au plus, sans même chercher le soutien des autres adultes. Même si j'ai la sympathie de la plupart, ils restent ses collègues à lui, pas les miens. J'ai perdu, et plus que je ne pensais.

- Je suppose qu'il n'est pas nécessaire de tenter une négociation.

Je pousse un léger soupire, forcément agacé par la nouvelle. Il a gagné, je n'ai pas mon mot à dire et je sais de toute façon qu'il ne me laissera pas en placer une de plus. Ne reste plus qu'à espérer qu'il ne sera pas de garde ce samedi, ou les quatre heures risquent de durer réellement quatre heures. Avec certains de ses collègues, au moins, il me suffira de parler un peu pour plaider ma cause et faire diminuer ma peine. Voilà ma prochaine bataille, même si le pion n'en n'aura jamais conscience : gagner du temps contre son gré.

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Des souvenirs plein la tête [joris timble]
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